Au 1er janvier 2019, la fusion des régimes de retraite Agirc et Arrco[1] vous imposera de repenser votre retraite
Régimes de retraite obligatoires par répartition pour tous les salariés du secteur privé[2], les régimes Agirc et Arrco fonctionnent par points. Ils sont gérés exclusivement par les syndicats d’employeurs et de salariés qui négocient des accords fixant les grandes orientations pour les retraites complémentaires, arrêtent des mesures pour assurer l’équilibre financier des régimes et améliorer leur gestion[3]. L’Arrco représente un peu plus de 18 millions de salariés cotisants et 12 millions de retraités (ouvriers, employés, techniciens, agents de maitrise et cadres). L'Agirc, elle représente plus de 4 millions de salariés et 3 millions de retraités (cadres et assimilés-cadres). Les salariés cadres cotisent aux deux régimes.
Depuis 1996, une politique de rapprochement entre les deux régimes est en cours, entérinée par un accord le 30 octobre 2015 : c’est ce dernier qui sera mis en œuvre en début d’année prochaine et les deux régimes fusionneront en un seul : Agirc-Arrco.
Les partenaires sociaux ont trouvé un accord pour équilibrer les comptes, déficitaires depuis des années, mais qu’en est-il pour les millions de salariés concernés ? La recension qui suit n’est pas exhaustive.
LA RÈGLE GÉNÉRALE
Pour les salariés nés après 1956, au moment où ils atteignent l’âge leur permettant prétendre à une retraite de base à taux plein (s’ils ont suffisamment cotisé pour y avoir droit, mais c’est une autre histoire), c’est la perte sèche : s’ils liquident leurs droits à compter du 1er janvier 2019 leur pension Agirc-Arrco sera minorée de 10% pendant trois ans maximum, c’est-à-dire au plus tard jusqu’à leurs 67 ans. Et ce malus affecte toute la complémentaire, majorations familiales incluses, et qu’il s’applique également aux départs anticipés pour carrière longue.
Pour mesurer l'impact de ce malus, il faut savoir que la part de la complémentaire Arrco-Agirc sur la pension de retraite totale (retraite de base + complémentaires) est de 30 à 35% pour les salariés non cadres et 55 à 60% pour les cadres. Seul moyen de ne pas être ainsi pénalisés : travailler plus longtemps !
LES EXCEPTIONS
Les salariés qui n’ont pas cotisé tous leurs trimestres avant de partir à la retraite, subissant déjà une décote viagère, ne sont heureusement pas concernés.
Seront exemptés du malus les travailleurs handicapés, les retraités au titre de l’inaptitude ou dans le cadre du dispositif amiante, les assurés ayant élevé un enfant handicapé…
Les assurés qui seront exonérés de CSG une fois à la retraite en raison de leurs revenus seront pénalisés seulement de 5%.
QUEL TAUX POUR LES RETRAITÉS DE 2019 ?
Les salariés qui souhaitent bénéficier du taux plein sans pénalité dès le début de leur retraite seront contraints de retarder leur départ. Les employeurs, eux, n’auront pas le choix : ils devront accepter cette rallonge de carrière.
Et si les salariés ne comprennent pas le bâton du malus, on leur ajoute la carotte d’une surcote pour la retraite de base et des points en plus pour leur complémentaire s’ils poursuivent leur activité : un an de plus, pas de décote ; ensuite, bonus pendant 1 an sur la complémentaire : de 10 % si le salarié travaille 2 ans de plus ; de 20% pour 3 ans et de 30 % pour 4 ans.
Les personnes ayant le statut de demandeur d’emploi à la fin de leur carrière ne n’auront pas d’autre choix que de subir le malus puisque Pôle emploi ne prolongera pas leur indemnisation.
AUTRES CONSÉQUENCES (CE N’ÉTAIT PAS FINI)
La conversion des points
Les cotisations de retraite complémentaire, prélevées sur les salaires, sont comptabilisées sous forme de points. Les valeurs des points Agirc et Arrco, actuellement différentes, seront remplacées, dans le nouveau système unique de retraite par points, par une valeur unique du point, avec un seul compte de points pour chaque salarié.
La valeur de ce point sera alignée sur la valeur du point Arrco. Par conséquent, rien ne change pour les salariés qui ne cotisent qu'à l'Arrco, par contre les points Agirc cotisés par les cadres seront convertis en points Agirc-Arrco… c’est-à-dire multipliés 0,347798289. Vous ne vous trompez pas : la valeur du point Agirc sera environ divisée par 3. Au moment de cette métamorphose, la valeur en euros des droits acquis sera maintenue. Mais cette équivalence des droits perdurera-t-elle ensuite ?
Les cotisations
À compter de 2019, les cotisations de retraite complémentaire seront réparties sur deux tranches de salaire pour tous les salariés : la première égale au plafond de la sécurité sociale (jusqu’à 39.000€ brut annuel), la seconde comprise entre ce plafond et 8 fois ce même plafond (soit 312.000€ brut annuel). La tranche C des cadres disparaît dans l’opération.
Répartition
La répartition des cotisations sera la suivante : 60% pour l'employeur, 40% pour les salariés. Elle est actuellement de 62/38 pour les cadres.
Suppression de la garantie minimale de points (GMP)
Légalement, le cadre est tenu d’obtenir un minimum de 120 points de retraite dans l’année, l’Agirc déterminant le montant minimal à cotiser pour acquérir ces points (en 2017, le seuil minimum de salaire a été fixé à 43.337,76€ brut dans l’année). Une compensation était attribuée aux cadres ayant perçu un salaire inférieur : la garantie minimale de points (GMP), qui leur permettait d’atteindre les 120 points demandés.
Cette GMP sera supprimée par la réforme, si bien que les cadres qui perçoivent les plus faibles rémunérations seront encore pénalisés.
Petit calcul : le seuil minimum de salaire fixé pour 2017 correspond à un revenu de 3611,48€ brut/mois sur 12 mois. Combien de psychologues ne dépassent pas ce seuil ?
Pension de réversion
Actuellement, les pensions de réversion Arrco peuvent être versées à leur bénéficiaire dès qu’il atteint 55 ans, les pensions de réversion Agirc, pas avant ses 60 ans
À compter de janvier prochain, une seule condition d'âge sera applicable au versement d'une pension de réversion Agirc-Arrco : 55 ans (si l’assuré décède après le 01/01/19).
Majorations familiales des cadres
Autre avantage pour les cadres (mais pas tous !) : ceux qui ont eu ou élevé trois enfants et plus, ou qui ont encore un ou plusieurs enfants à charge pouvaient voir leur retraite complémentaire augmentée de 10%, limités à un plafond annuel de 1000€ pour l’Agirc comme pour l’Arrco. Ce plafond passera à 2 000€ par an.
Les syndicats pilotant les régimes de retraite complémentaire :
Agirc : Mouvement des entreprises de France (MEDEF), Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), Union des entreprises de proximité (U2P) ; Confédération française de l’encadrement CGC (CFE-CGC), Union des cadres et ingénieurs de la CGT-Force ouvrière (FO-Cadres), Union confédérale des ingénieurs et cadres CFDT (CFDT Cadres), Union générale des ingénieurs, cadres et assimilés CFTC (UGICA-CFTC), Union générale des ingénieurs, cadres et techniciens CGT (UGICT-CGT)
Arrco : Mouvement des entreprises de France (MEDEF), confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), Union des entreprises de proximité (U2P) ; Confédération française démocratique du travail (CFDT), Confédération française de l’encadrement CGC (CFE-CGC), Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC), Confédération générale du travail (CGT), Confédération générale du travail – Force ouvrière (CGT-FO)
Mise à jour du 06/12/18
Un « Avis relatif à l'extension et à l'élargissement de l'avenant n° 1 à l'accord national interprofessionnel instituant le régime Agirc-Arrco de retraite complémentaire » est paru le 4 décembre 2018. Il s’agit d’ajustements techniques visant à faire rectifier des erreurs dans les textes précédents (Cf. site Légifrance : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000037679290)
[1] Association générale des institutions de retraite complémentaire des cadres, créée en 1947 et Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés, créée en 1962 par la fusion de plusieurs régimes de retraite complémentaire, généralisée en 1972. La Convention collective nationale Agirc date de 1947 et l’Accord national interprofessionnel de l’Arrco du 8 décembre 1961.
[2] De façon marginale, certains salariés du secteur privé peuvent relever du régime de retraite complémentaire de la Fonction publique
[3] https ://www.agirc-arrco.fr/qui-sommes-nous/pilotage/