La Loi du 24 janvier 2022 « relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure limite l’irresponsabilité pénale en cas de trouble mental résultant d’une intoxication volontaire aux substances psychoactives ». Après l’article 122-1 du code pénal, sont insérés deux nouveaux articles 122-1-1 et 122-1-2 et d’autres articles dont nous vous invitons à prendre connaissance. Ils viennent sensiblement modifier la question de l’abolition et de l’altération du discernement. Les deux décrets qui suivent accentuent l’assimilation de la pathologie avec la dangerosité, voire le terrorisme.
Cette Loi fut prise en réaction à l’affaire dite « Halimi ». Bien que la question du discernement est habituellement posée aux psychiatres experts (les psychologues-experts n’auraient-ils rien à en dire ?), les psychologues experts ne manquent pas de s’interroger sur ces nouvelles mesures, prises sans concertation avec les professionnels, laissant croire que le sujet atteint de troubles mentaux plus ou moins sévères, échappaient au jugement jusqu’alors, ce qui n’est pas le cas. Elle modifie l’approche de la pathologie mentale, son traitement et sa prise en compte dans les cas de passages à l’acte.
Le SNP constate, comme nombre de professionnels de la santé mentale, la volonté du gouvernement de méconnaître la spécificité de la souffrance psychique et de la pathologie mentale en les pénalisant.
■ Le premier décret (N°2022-657), publié au JO le 26 avril 2022 mentionne que l’article sur l’abolition du discernement pourra s’appliquer « lorsque le trouble mental ne résulte pas d’une intoxication volontaire de la personne mais qu’il résulte, par exemple, de l’arrêt par celle-ci d’un traitement médical ».
L’observance d’un traitement relève de la problématique des patients que ce soit par non compliance ou par déni de la pathologie. Il est partie intégrante des axes de travail des équipes de soins, et en particulier des psychologues.
La logique du décret ferait de l’arrêt ou de la suspension du traitement un acte volontaire. Ce déni de la pathologie mentale entraîne des conséquences lourdes sur l’approche judiciaire des passages à l’acte dans le cadre de troubles pathologiques de la conscience.
■ Le deuxième décret (N°2022-714), publié au JO le 28 avril, complète celui du 06 mai 2019 et introduit la possibilité de croisement des données entre le fichier Hopsyweb qui recense les hospitalisations sans consentement en psychiatrie et le fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT).
Nous avions dénoncé en mars 2020 un certain nombre de textes (décret du 6 mai 2019) accentuant les procédures de fichage sécuritaire par le croisement de données entre Hopsyweb et FSRT. Cette logique n’apparaît en rien justifiée. Le choix politique est celui d’ignorer l’expérience des professionnels et les travaux des chercheurs.
Le refus d’un travail de concertation avec les acteurs de terrain conduit à des choix politiques qui apparaissent électoralistes. Les amalgames, approximations et contre-sens, relèvent d’une volonté de pénaliser, dans une politique répressive, la pathologie mentale, introduisant la problématique de la preuve à celle de la maladie mentale.
Nous exigeons du gouvernement l’abrogation de ces deux décrets afin que les personnes souffrant de pathologie mentale soient respectées dans leurs droits et pas victimes d’une stigmatisation supplémentaire.
Nous appelons les professionnels à se mobiliser pour défendre les droits des patients, pour exiger une concertation avec les professionnels de terrain.