La CFTC et le SNP, déboutés de leur demande pour le maintien de l’article 4 de l’annexe IV ont décidé de faire appel !
Rappel des faits:
1) L’article 4 de l’annexe IV de la CC du 15 mars 1966:
Que disait-il ?: “(…) psychologues: 24 heures de travail technique + réunions de synthèse et rapport terminal + travail de documentation personnel = 40 heures”
Qu’en était-il pour les psychologues sur le terrain?
Nombre de psychologues ne bénéficiaient d’aucun temps personnel de documentation. D’autres bénéficiaient d’un tiers-temps, calqué sur celui de la Fonction Publique Hospitalière. D’autres bénéficiaient d’un temps plus ou moins variable, s’étendant selon l’accord de l’employeur, entre deux heures hebdomadaires et douze heures pour les mieux lotis (pour un temps plein). Ce temps était généralement effectué à l’extérieur de l’établissement.
Certains employeurs exigeaient des justificatifs, tandis que d’autres accordaient une entière liberté aux psychologues d’user de ce temps personnel de documentation selon leurs besoins.
A noter que malgré plusieurs tentatives réitérées du Secteur des Conventions Collectives, les psychologues, lecteurs du bulletin syndical, n’ont jamais répondu à nos enquêtes pour nous dire s’ils bénéficiaient ou non de ce temps de travail et dans quelles conditions. Il nous est donc impossible de décompter le pourcentage de psychologues tous champs et tous secteurs confondus qui bénéficiaient et qui continuent de bénéficier, d’un temps DIRES et dans quelles proportions.
La lecture de l’article 4 – et ce ne fut pas là le plus mince problème – laissait le lecteur (employeur, représentant du personnel, inspecteur du travail, psychologue) dans le plus grand flou. Toutes les interprétations devinrent donc possibles et par voie de conséquences, variables et variées.
Partant du raisonnement suivant que: 5 X 8 = 40, on en vint à admettre 5 séquences de 8 heures de travail. Et comme 3 X 8 = 24, on en vint à déduire que si l’on considérait les 24 heures de travail technique notifiées par l’article 4 pour les psychologues, il restait 40 – 24 = 16 heures pour… le reste du travail psychologique, à savoir les réunions de synthèse et rapport terminal + travail de documentation personnel d’où deux séquences de 8 heures, soit 2/5 ème du temps de travail global, d’où 1/5 ème de temps réservé pour le temps personnel de documentation. (CQFD), calculé au prorata temporis pour les psychologues salariés à temps partiel.
(A noter au passage que les kinésithérapeutes (personnels paramédicaux subordonnés à l’article 4 de l’annexe IV), bénéficiaient quant à eux, non pas d’un temps de documentation personnel mais de préparation: “temps de travail; préparation; intervention auprès des enfants; exploitation”)
Ce flou qui pouvait servir certains psychologues pouvait a contrario desservir nombre d’entre eux qui ne bénéficièrent jamais d’un temps DIRES. Telle fut la réalité professionnelle des psychologues sur le terrain depuis le 15 mars 1966 jusqu’au 1° mai 2001.
2) la jurisprudence du 4 janvier 2000
La jurisprudence du 4 janvier 2000 (postérieure à l’avenant 265-cadre du 21 avril 1999) a légitimé le temps DIRES qui n’est pas supprimé, loin s’en faut, même si la répartition des séquences de travail devait être de la compétence de l’employeur.
- par conséquent, le temps personnel de documentation notifié par contrat de travail ne peut en aucun cas être autoritairement supprimé par l’employeur, selon la jurisprudence du 4 janvier 2000;
- le temps personnel de documentation peut être effectué sur place, soit selon le souhait du psychologue, soit sur décision de l’employeur, ou de préférence, à l’extérieur de l’établissement, (avec l’accord de l’employeur).
- conformément à la loi Aubry II, confirmé par jurisprudence, l’employeur n’est pas autorisé à modifier le contrat de travail du salarié sans son accord et par conséquent, l’obligation de lui faire effectuer sur place le temps DIRES, ne peut et ne doit pas entraîner de modification du contrat de travail du psychologue. Un éventuel licenciement serait qualifié “sans cause réelle ni sérieuse” (cassation du 31 mai 2006).
- l’employeur qui serait compétent pour fixer la répartition des séquences de travail du psychologue, ne serait aucunement dans l’obligation de supprimer le temps personnel de documentation des psychologues et a contrario, il aurait la compétence de maintenir ce temps de travail pour les psychologues en fonction dans l’établissement ou le service, ou de l’octroyer aux psychologues nouvellement embauchés.
Le SNP attire l’attention des psychologues sur la confusion existant entre la répartition du temps de travail des psychologues qui pourrait être de la compétence des employeurs depuis l’application de l’avenant 265-cadre en date du 1° mai 2001 et le maintien du temps DIRES ou la prétendue suppression de ce temps personnel de documentation qui serait consécutive à l’abrogation de l’article 4 de l’annexe IV, si l’appel du jugement du 9 mai 2006 devait la confirmer.
Le SNP et la CFTC persistent et signent pour réaffirmer que ce temps de travail à part entière, ne doit pas être remis en cause quel que soit le champ ou le secteur d’intervention, parce qu’il est indispensable aux psychologues et parce qu’il a été légitimé par jurisprudence depuis le 4 janvier 2000.
C’est pourquoi, nous engageons plus que jamais les psychologues concernés à poursuivre leurs négociations internes auprès de leurs employeurs avec si possible l’appui des représentants du personnel et des organisations syndicales, en particulier avec la CFTC et d’entamer si nécessaire, une action prud’homale pour conserver leur temps DIRES dans les conditions antérieures à l’avenant 265-cadre et dans le respect de leur contrat de travail initial
3) La note N° 88 de janvier 2005 du SNASEA
La note rédigée par le SNASEA indiquait que les psychologues dont le temps personnel de documentation était notifié par écrit dans leur contrat de travail, conservaient le bénéfice de ce temps confirmant ainsi la jurisprudence du 4 janvier 2000.
“La répartition du temps de travail des psychologues est donc bien de la compétence de chaque employeur, en fonction des spécificités de l’emploi, sauf si les psychologues disposent, dans leur contrat de travail, d’une clause spécifique de répartition.”
Cette précision devrait permettre de mettre fin à la polémique engagée entre les psychologues bénéficiant du temps DIRES par contrat de travail dont les employeurs décident autoritairement de sa suppression, bafouant sans scrupule, le respect du code du travail. C’est pourquoi, nous engageons tous ces psychologues dont le temps personnel de documentation serait attaqué, à opposer la note du SNASEA et à demander le soutien des représentants du personnel et l’intervention de l’inspecteur du travail pour le respect de leur contrat de travail.
Il est clair que les psychologues qui bénéficient d’un temps personnel de documentation notifié dans leur contrat de travail le conservent et devront continuer de le conserver à l’avenir, dans les conditions du dit contrat. Pour les psychologues concernés, le litige avec leur employeur relèverait de la compétence du Conseil des Prud’hommes.
Cependant, aujourd’hui comme hier, de nombreux employeurs ne remettent pas en question l’usage du temps DIRES et continuent de l’octroyer aux psychologues qu’ils emploient ce qui témoigne de la possibilité de l’existence de relations professionnelles employeurs-salariés, faisant le choix délibéré de privilégier la qualité du travail à la rentabilité économique. Ceci démontre également que des employeurs peuvent de sentir libres de faire le choix de fonder leurs relations autrement que sur le pouvoir et que des employeurs peuvent conserver leur autonomie face aux organismes payeurs, aux syndicats d’employeurs ou aux Directeurs Généraux d’associations et favoriser par une attitude d’ouverture, un climat de respect mutuel, de confiance et de sérénité au sein des établissements ou des services qu’ils dirigent.
Le SNP et la CFTC – s’appuyant sur tous ces employeurs qui défendent avec leurs salariés, la légitimité et l’utilité incontestable du temps de documentation personnel pour les psychologues – persévèrent sans faillir, au lendemain d’un jugement qui leur est provisoirement défavorable – pour défendre le maintien de ce temps de travail, fondamental et fondateur de notre profession, tous secteurs et tous champs confondus.
4) Le jugement rendu le 4 juillet 2006 par le TGI de Paris:
(…) “Le Ministre de l’Emploi et de la Solidarité a agrée le 16 juillet 1999 l’accord cadre du 12 mars 1999.
Il en résulte qu’à partir de cette date les dispositions de l’article 4 de l’annexe 4 ont cessé d’être applicables aux psychologues, désormais régis par les dispositions du statut général des cadres prévue par l’annexe 6 de l’avenant 265-cadre du 21 avril 1999 et non par les dispositions particulières.
Il convient de débouter le syndicat et la fédération de toutes leurs demandes.”
(…) Par ces motifs
Le tribunal (…) déboute le Syndicat Général Enfance Handicapée des Personnes Salariées des Etablissements Sociaux et Médico-Sociaux (SGEIH-CFTC) et la Fédération Nationale des Syndicats Chrétiens Santé Sociaux de toutes leurs demandes” (…)
Ses effets pour la répartition des séquences de travail des psychologues:
Les séquences de travail A, B, C de l’accord cadre du 12 mars 1999 ne concernant pas les psychologues – qui ne sont pas personnels paramédicaux répertoriés dans la liste de l’avenant N° 3 du 14 mars 2000 et de son annexe N° 3 – la répartition de leurs séquences de travail n’est donc pas définie par l’annexe cadre N° 6 de la convention collective 66, ce que semble avoir occulté le jugement sur le fond du Tribunal de Grande Instance du 9 mai 2006 dont le délibéré a été rendu le 4 juillet 2006.
Ceci pourrait placer les psychologues régis par la CC 66 devant un vide juridique litigieux, pour la répartition de leurs séquences de travail. Un avenant spécifique aux psychologues tel que la CFTC l’a proposé à plusieurs reprises depuis 2001, pourrait pallier à cette situation délicate. La volonté consensuelle des négociateurs signataires de la Convention Collective du 15 mars 1966 (CGC, CGT, CGT-FO, CFDT, CFTC) réussirait probablement à la signature d’un avenant prenant enfin en compte notre profession dans sa spécificité.
Par ailleurs, que la répartition du temps de travail soit de la compétence de l’employeur ne devrait pas supprimer pour autant ce temps de travail, précieux et fructueux pour les psychologues, qu’il soit effectué à l’extérieur de l’établissement ou qu’il soit fait sur le lieu de travail. Cependant, pour le SNP, son exécution sur place n’aurait évidemment aucun sens car il ne permettrait que des lectures d’ouvrages ou de revues spécialisées, ce qui serait loin de recouvrir le champ et l’esprit du temps personnel de documentation et de recherche qui s’étend le plus souvent vers la psychanalyse individuelle ou groupale, la supervision, le contrôle des pratiques par des pairs etc…. ne pouvant être effectués qu’à l’extérieur de l’établissement ou du service.
En outre, l’employeur qui serait compétent pour gérer la répartition du temps de travail des psychologues, ne le serait-il pas également pour accorder le temps DIRES aux psychologues, comme il le faisait par le passé avant l’application de l’avenant 265-cadre du 21 avril 1999? De fait, l’employeur peut légitimement et légalement accorder aux psychologues, un temps de documentation personnel, aucune loi ni décret ni circulaire ne le lui interdisant, surtout pas l’avenant 265-cadre ou l’accord cadre du 12 mars 1999!
Pour conclure, le SNP et le secteur des Conventions Collectives, on besoin de la cohésion, de la solidarité et de la détermination de tous pour défendre au mieux notre profession malmenée.
Enfin, à l’issue de ce jugement et dans la perspective de l’Appel, il nous paraît urgent de remettre en chantier, le projet d’avenant spécifique au personnel psychologique, prévoyant un temps personnel de documentation comme cela a été tenté en vain à plusieurs reprises, en particulier par le SGEIH-CFTC que nous remercions vivement de son soutien constant depuis de longues années.
Danielle MERCIER-COUDERC
Responsable bénévole de la Convention Collective 66 au SNP
le 27 juillet 2006
NB : Le jugement de la Cour d’Appel dont nous attendons la date avec impatience, sera déterminant pour les psychologues. Plus qu’une simple clarification des séquences de travail et plus que la reconnaissance d’un temps personnel de documentation, c’est la fonction même de notre profession et le sens de notre mission qui en seront orientés.
Les psychologues doivent résister encore dans l’attente de ce jugement essentiel, pour ne pas abandonner aux employeurs, ce temps de travail conventionnel, indispensable à la qualité de leurs interventions psychologiques au sein des établissements ou des services qui les emploient.
DMC le 12 février 2007