Défendre les missions éducatives et les structures existantes
Le SNPES-PJJ/FSU et le SNP appellent à une mobilisation de l’ensemble des personnels autour de la tenue des CAP, parce que celles-ci concrétisent la mise en place des nouvelles orientations et le sacrifice de l’existant (près de 30% des postes proposés aux Commissions Administratives Paritaires pour les Centres d’Education Fermés et les Etablissements Penitentiers pour Mineurs) :
Tous en grève le 10 Mai 2006
Les missions et les moyens de la PJJ sont aujourd’hui attaqués de toute part. Les conséquences de ces attaques se font sentir dans l’ensemble des structures existantes et remettent en cause la diversité des réponses éducatives qui peuvent être apportées aux jeunes en difficulté.
Nous le voyons au plan budgétaire dans l’application généralisée
de la LOLF par la PJJ depuis le 1er janvier 2006 :
- Restrictions budgétaires et retards importants dans le déblocage des crédits ont mis en difficulté la plupart des structures et obligé des personnels à faire des avances sur leurs fonds propres pour le fonctionnement au jour le jour.
- Limitation drastique des dépenses consacrées aux jeunes majeurs invalide le travail éducatif entrepris auprès de ceux-ci et les laisse sans aucune aide comme si tout était joué à 18 ans.
- Baisse importante des crédits alloués aux services associatifs habilités qui menace à très brève échéance l’existence même des petites structures (comme les lieux de vie) dont l’intérêt dans les prises en charge éducatives n’est plus à démontrer. Par contre, les grosses associations qui se sont fortement impliquées dans l’ouverture des centres fermés bénéficient de la manne budgétaire qui en découle.
- Budgets prévisionnels pour 2006 qui ne permettront pas dans de nombreuses régions de payer l’ensemble des personnels présents en début d’année, ce qui augure de la suppression de postes et de l’utilisation encore plus intense de contractuels. Le travail éducatif en sera encore plus fragilisé, le travail des agents chargés de la gestion (attachés, SA, agents-adjoints) en sera encore augmentée.
- Retard dans l’organisation des concours de recrutement pour l’année 2006.
Dans le même état d’esprit, les crédits au CNASEA sont supprimés et les fonds FSE nécessaires au co-financement de certaines formations sont menacés, ce qui n’autorise plus la poursuite des stages en cours ni la mise en place de nouveaux agréments de stage pour les jeunes suivis à la PJJ, ainsi que leur rémunération.
Pendant ce temps, les projets de construction d¹EPM et de centres fermés, ne connaissent, eux, aucune restriction.
Nous le voyons dans la circulaire mobilité 2006. En donnant la priorité aux centres fermés et aux Etablissements Pénitentiaires pour Mineurs au détriment du maintien et du développement de l’existant, le but est bien :
- De banaliser l’incarcération en l’inscrivant dans le parcours” du jeune ainsi que le déclare le directeur de la PJJ,
- De miser sur la confusion entre éducation et contention en présentant les centres fermés comme le nouveau modèle de l’hébergement à la PJJ,
- De préparer la réintégration de la PJJ au sein de l’AP et l’amalgamme de leurs missions,
- D’empêcher la diversité des réponses éducatives
Pendant ce temps, de plus en plus de structures d’hébergement ferment ou sont dans le colimateur de l’administration. Après les fermetures de Montpellier, Brignoles, La Rochelle, Le Havre, après les officialisations concernant Mulhouse, Savigny, Maisons-Alfort ou Aubervilliers, d’autres foyers, quelle que soit leur dénomination, sont programmés pour leur disparition.
Ces fermetures arbitraires remettent en cause la situation de tous les personnels qui y sont affectés. Et ce ne sont pas aujourd’hui les tentatives de discussion sur les redéploiements qui empêcheront les bouleversements autoritaires dans les conditions de travail des agents ou par rapport à des pertes de salaire. Mais, dans le même temps, ce sont aussi l’ensemble des autres personnels qui voient leurs possibilités de mutations réduites du fait des réaffectations.
De plus, par la fermeture des tiroirs au gré des décisions des Directions Régionales (LOLF oblige) ou des départs pour les EPM, ce sont les capacités de prise en charge du secteur public de la PJJ qui sont restreintes au détriment de l’intérêt des mineurs suivis.
C’est bien le travail éducatif ” ouvert ” qui est délaissé au profit de ces nouvelles orientations : les services de Milieu Ouvert qui subissent les listes d’attente, l’hébergement et l’insertion sociale et professionnelle qui voient leurs capacités d’accueil se réduirent. C’est bien le savoir faire des personnels de la PJJ qui est nié, la prise en charge proprement éducative des jeunes en difficulté qui est abandonnée, et nos métiers qui sont dénaturés.
Tous ensemble, nous nous devons de réagir pour obtenir les moyens afin de maintenir la diversité dans les prises en charge éducatives des mineurs et jeunes majeurs à la PJJ et défendre l’existant.
Agissons pour nos revendications :
- Maintien des capacités de prise en charge éducative existantes de la PJJ :
- Pas de fermeture de structure sans engagement de réouverture
- Remplacement de tous les départs de personnels enregistrés en CAP
- Réaffectation des personnels redéployés au plus près de leur lieu de travail initial (région ou département), quitte à renforcer les capacités de l’ “offre” éducative en milieu ouvert, en insertion, en hébergement classique
- Maintien des Aides aux Jeunes Majeurs en termes de suivi éducatif et d’hébergement.
- Restauration des crédits correspondant aux prises en charges effectuées et à venir par les associations habilitées qui ont des jeunes placés par les juges et répondent à un besoin éducatif reconnu
- Rétablissement des crédits CNASEA pour l’insertion professionnelle
Pour défendre ces revendications, Le SNPES-PJJ /FSU et le SNP appellent tous les personnels :
- A une journée de grève le 10 mai, à la veille de la tenue de toutes les CAP
- A ne pas siéger aux CAP qui se tiennent les 11 et 12 mai (Attaché, Infirmier, Conducteur Auto, Agent spécialiste)
- A la tenue d’AG dans tous les départements le mardi 16 mai pour examiner les modalités d’actions nécessaires à la satisfaction de nos revendications
- A ne pas siéger aux CAP des 17 et 18 mai (Directeurs et Educateurs poste
- spécifiques)
- A préparer une semaine d’action autour de la période du 1er au 9 juin (CAP Agent- Adjoint, Psychologue, Professeur Technique, Educateurs postes clasiques).
Nous continuerons à rechercher au plan national l’unité la plus large possible des organisations syndicales pour permettre cette mobilisation. Nous appelons les sections départementales à agir dans le même sens.
Ne laissons pas l’éducatif devenir l’alibi et l’otage de la contention et de la pénalisation de la jeunesse, gardons nos valeurs et notre identité en défendant nos missions et les moyens de l’action éducative “ouverte” !!!
Texte de la lettre de la commission justice du SNP:
Chers confrères,
En tant que syndicat de professionnels le SNP a une responsabilité dont lui fait obligation le Code de Déontologie dans son premier article sur le principe de « respect des personnes » :
« Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationales, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. «
Lorsque nous voyons s’annoncer des atteintes à ces droits, que celles-ci vont directement menacer la liberté, la dignité, et la protection de la jeunesse, le SNP agit en accord avec cette responsabilité en s’associant aux luttes qui sont menées sur le terrain des principes et des valeurs.
C’était déjà le cas en Novembre 2005 quand nous avons appelé avec la FSU et la LDH, à protester contre les « nouvelles orientations » de la PJJ et la création des EPM ; contre le détournement des moyens et du sens des missions de la PJJ au service d’une politique qui sacrifie tout le travail de prévention et l’action éducative pluridisciplinaire digne de ce nom, pour offrir plus de places de prison pour la jeunesse délinquante.
Récemment encore, le SNP s’est associé à la lutte de toutes les organisations syndicales contre le détournement de sens consistant à présenter comme une « égalité des chances » une loi visant à créer une inégalité de droit, et portant atteinte à la dignité des travailleurs jeunes, discriminés de par leur âge dans l’accès à l’information sur les motifs de décisions qui les regardent au premier chef.
Même si les autres syndicats présents à la PJJ, qui pourtant se mobilisent régulièrement de façon unitaire sur des revendications matérielles ou horaires, ne sont pas aussi sensibles que nos deux organisations syndicales à la question des valeurs et du sens du travail, le SNP ne peut pas rester inactif quand ces questions sont au premier plan des évolutions en cours.
Pour le SNP, actuellement, il s’agit de soutenir des emplois de psychologues mais pas dans n’importe quelles conditions et pas n’importe où.
Il s’agit de défendre ce qui fait exigence à notre métier a savoir les garanties d’exercice nécessaires pour les personnes que nous recevons.
Des psychologues « de » la PJJ devant « dire le possible » et « ce qui marche ou ne marche pas» , mis au service d’institutions qui s’inspirent des erreurs du passé afin de (re)dresser les enfants par une éducation très très surveillée, est-ce bien nécessaire? Est-ce même souhaitable ?
Comment accepter, sans réagir, que des psychologues « de » la PJJ soient nommés à cette cession des Commissions Paritaires de la PJJ pour occuper des postes en Prison (ce que sont les EPM) alors qu’on ne sait rien du tout de la volonté et de la capacité des deux institutions concernées (AP et PJJ) de comprendre et soutenir un cadre d’exercice protecteur pour les droits des mineurs et le respect de leur personne par le psychologue ?
Comment laisser créer sans protester un contexte où la PJJ n’a rien à proposer ou à mettre en place d’autre que l’instrumentalisation des personnels PJJ pour la « gestion » directe de la détention, dans une indifférenciation avec les personnels de surveillance qui est baptisée « pluridisciplinarité » – alors qu’il s’agit de collusion organisée.
Tout cela dans un contexte où la façon dont a été préparé la « Fiche Métier » des psychologues, tant dans la méthode que dans le contenu, ne peut en rien nous rassurer sur la capacité et la volonté de l’administration de la PJJ de comprendre et respecter les spécificités de notre métier et nous donner une mission clairement démarquée de l’instrumentalisation et l’indifférenciation. Qu’en sera t-il du référentiel compétence à venir ?
Sans cette volonté et cette capacité, nous savons que la liberté dans l’accès et le refus des sujets d’une rencontre avec le psychologue dans ce contexte très particulier, ainsi que le respect du secret professionnel indispensable à l’obtention de la confiance et au processus d’élaboration, seront constamment menacés.
Même si du temps est prévu (mais combien ? on ne sait pas..) pour que les psychologues contractuels employés par l’administration pénitentaire interviennent en soutien des pratiques professionnelles des personnels, nous savons que le psychologue employé par la PJJ à plein temps sera exposé seul aux désirs (compréhensibles) des 120 personnels qui « encadreront » les mineurs, et voudront obtenir des recettes et des informations sur « l’état » psychologique des mineurs… Cela en plus des besoins des 60 mineurs dont le temps de présence sera de deux mois en moyenne, ce qui représente sur une année environ 360 sujets, que l’UCSA (Unité de soins dépendant de la Santé) aura très peu de moyens pour écouter et soutenir, dans un cadre qui, au moins, y serait approprié.
Sans ce cadre approprié, le psychologue « de » la PJJ sera exposé à l’épuisement et à la confusion des missions s’il tente de « répondre aux demandes » des autres personnels, à être annulé ou attaqué s’il résiste aux pressions internes et externes qui l’y conduiraient, au détriment des mineurs et de la déontologie.
Nous ne voyons pas l’utilité de faire courir de tels risques aux professionnels et aux usagers.
C’est pourquoi nous demandons, tout comme le font nos confrères du SNPES, qu’il soit plutôt prévu, si la PJJ tient absolument à mettre des moyens en psychologues dans ces structures, que ceux-ci soient rattachés à un cadre d’exercice au service de la santé (au sens large) où il s’agit de préserver la vie et l’avenir psychique d’adolescents, particulièrement menacés de par leur structure, leur âge, dans un contexte institutionnel qui peut également les exposer.
Il y a suffisamment de besoins en attente pour un travail réellement pluridisciplinaire, où nos compétences sont effectives et utiles, pour d’autres modalités de travail avec les mineurs, jeunes majeurs et leur famille pour que nous ne faisions pas tout ce qui est en notre pouvoir, pour les préserver.
C’est pour cela que nous nous associons à d’autres pour lutter :
- Contre le détournement des moyens en psychologues et en éducateurs vers des formes de travail dont les objectifs affichés tiennent plus, pour le moment, de l’affichage idéologique que d’une réelle réflexion sur ce qui serait effectivement utile et professionnellement adapté pour améliorer la prise en charge et les réponses aux besoins des jeunes incarcérés.
- Contre l’absence de garanties pour les sujets et pour les professionnels à qui on impose « pour leur bien » ces dispositifs nouveaux, sans respect ni précautions, nous avons choisi d’appeler avec « au moins un autre » syndicat à la grève et à l’action pour défendre « ce qui marche » (puisqu’on nous y convie !)- c’est à dire le travail « dans l’ouvert » et le risque de l’humain.
Nous espérons que les psychologues seront nombreux dans les débats et réunions intersyndicales qui auront lieu à cette occasion. Et comme toujours, vous êtes invités à nous faire connaître vos suggestions et à enrichir nos réflexions.
Nous vous rappelons que le 12 Juin à 14h, aura lieu au 78 rue de Sèvres (75007) notre réunion syndicale ouverte à tous les psychologues exerçant à la PJJ ce qui nous permettra de faire le bilan de cette action et de réfléchir à la suite.
Pour la commission justice
Christine MANUEL
Les Elues et la Responsable de la Commission