P&P n°252-253 : La procréation médicalement assistée (déc 2017)
Description
D’un point de vue biologique, les êtres humains sont amenés – certains les pensent programmés – à se reproduire.
Ainsi, la perpétuation de la vie de l’espèce, nous anime, en situation de couple majoritairement ou de façon individuelle parfois. Elle prend des formes sociales et juridiques diverses selon les époques, les lieux, les cultures. Il s’agit alors de fonder et faire famille.
Mais l’accès à la parentalité ne va pas de soi et peut s’avérer particulièrement difficile. Les problématiques physiques, psychiques et relationnelles apparaissent, multiples.
Aujourd’hui, les techniques médicales peuvent offrir un accès à la parentalité pour les personnes en situation d’infertilité. Comment la femme, l’homme, le couple s’engagent-ils dans le parcours qui leur est alors en quelque sorte prescrit ? Quels en sont les obstacles mais aussi les répercussions psychiques et somatiques des traitements ? Dans ce contexte, comment se négocie(ra) le lien parent-enfant ?
La diversité des configurations familiales d’une part (monoparentalité, co-parentalité, homoparentalité, famille recomposée) ainsi que l’accès et le parcours de PMA d’autre part, amènent notre société à s’interroger sur les différents enjeux qu’ils soient psychologiques, éthiques, sociaux, religieux, juridiques, ou philosophiques.
Il est donc question dans ce dossier des souffrances liées à l’infertilité, des problématiques et questionnements que soulève la Procréation Médicalement Assistée, des parcours semés d’embuches et des écueils de la procréation.
La PMA constitue un engagement à risques, coûteux, éprouvant pour les personnes qui s’y engagent. Ce qui relève en premier lieu de l’intimité de la personne et/ou du couple est soumis à la sphère médicale, et/ou exposé sur la scène publique sociale, politique, juridique. La situation d’infertilité et la Pma confrontent les sujets à des angoisses éventuellement massives, à une réactualisation de conflits non résolus ou de traumatismes, au poids de l’héritage transgénérationnel.
Joëlle Desjardins-Simon est riche d’une réflexion de longue date et y fait référence avec de solides apports théoriques. Elle s’intéresse ici aux enjeux psychiques qui président à la conception d’un enfant, avec les éventuelles butées inconscientes qui peuvent, en définitive, entraver ou mettre en échec l’accès à la parentalité.
Clotilde Perreve rend compte du parcours d’une femme qui lutte contre son corps et la biologie pour assouvir son désir d’enfant. Elle est traversée, ce faisant, par des mouvements mélancoliques induits par la PMA. Parallèlement au transfert embryonnaire, le transfert analytique interviendrait alors pour soutenir l’élaboration préalable et nécessaire à une éventuelle disponibilité psychique pour la survenue d’une nidation, d’une grossesse, d’une naissance.
Valérie Benoit envisage la Fécondation in Vitro comme une épreuve pour les couples qui s’y essaient. Elle traite de l’infertilité en tant que sous-tendue par des problématiques du registre défensif ou traumatique. Ceci dans une perspective théorique structurée que viennent illustrer des vignettes très éclairantes.
Béatrice Toulon aborde le désir d’enfant vécu au sein d’un couple dans un sentiment d’urgence lié à l’âge, avec les remous induits par l’épreuve de l’infertilité, les essais infructueux et les représentations sociales parfois très lourdes à porter. Dans ce contexte il est question d’une mise à mal des assises narcissiques et d’une attaque d’un aspect de l’idéal du moi féminin – la maternité.
Françoise Denan nous propose le parcours d’une patiente empreint d’illusion romantique dans lequel surgissent, à l’issue d’une liaison, des angoisses autour de l’incertitude du père. Elle présente un désir d’enfant motivé par les ressorts du roman familial et du conformisme au point que la médecine et, dans une certaine mesure, le conjoint, constituent des instruments concourant à la fabrique d’un bébé voulu – par la femme seule.
Avec retenue et sensibilité, Mijica évoque une infertilité non pas pathologique, mais construite.Elle témoigne de son expérience, de ses éprouvés en lien avec son parcours de PMA et son désir d’être parent dans le contexte social et juridique actuel qu’elle vit difficilement.
Marie-Claude Picardat parle au nom de l’Association de Parents et futurs Parents Gays et Lesbiens (APGL). Elle expose la question de la famille dans le contexte social, juridique et politique dans lequel s’inscrit l’homoparentalité. Pour ce faire, elle s’appuie sur l’histoire de l’action de l’APGL et sur le positionnement de l’association qui travaille à l’accès à la parentalité et/ou sa reconnaissance.
Au fil d’un entretien avec un prêtre et conseiller conjugal, Gabriel Villemain, Louise Romet Veauvy et Charles Romet interrogent le lien parent-enfant dans la spécificité du parcours de PMA. Le Père Gabriel Villemain insiste sur la question de la gratuité et de l’authenticité du lien, au sein du couple parental quel qu’il soit, et entre parent(s) et enfant(s).
Alice Béchu nous indique que lorsque le désir d’enfant se voit barré d’abord par l’infertilité puis par un décès périnatal – comme une fausse couche, une mort foetale – le travail de deuil s’avère problématique de même que les futurs liens précoces avec des enfants à naître. L’auteure rapporte et analyse les émotions et les souffrances ressenties au cours et à la suite de ces deuils.
Marie-Laure Balas et Caroline Ghizzi- Carimantran insistent sur l’aspect traumatiquede l’infertilité que chacun des partenaires éprouve et exprime différemment dans le couple. L’accompagnement psychologique proposé au fil du parcours de PMA fait particulièrement état de l’angoisse intense, chez l’homme et chez la femme, de ne jamais porter d’enfant.
Jean-Pierre Durif-Varembont et ses collègues rendent compte d’un travail de recherche sur les couples inscrits dans un parcours d’Insémination avec don de sperme, qu’ils soient donneurs ou receveurs. A partir d’entretiens avec chacun des membres de ces couples, les auteurs évoquent les fantasmes et analysent les fonctions psychiques à l’oeuvre dans les dynamiques individuelles.
Marie-Angèle Hermitte, juriste, a participé au travail du Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE). Cet entretien est l’occasion d’exposer son point de vue et celui du CCNE sur l’accès à la PMA pour toutes les femmes en évoquant, au delà des femmes, les enfants, les donneurs de sperme et la médecine.
Enfin Benoit Guttadauro illustre comment le recours à la PMA peut transformer le désir d’enfant en un vouloir qui relève de la jouissance de l’objet. La science offre la promesse, l’illusion, d’une annulation de la castration liée à l’infertilité. Il s’agit alors pour le psychologue d’aider le sujet à s’inscrire dans un projet parental ou un exercice de sa parentalité où il sera mené par le désir plutôt que dans une dynamique de droit à l’enfant.
La PMA amène à interroger parfois ce que la société se représente comme des certitudes ou ce qu’elle n’envisageait pas jusqu’alors. A l’instar d’avancées et d’autres techniques médicales, les perspectives qu’elle ouvre sont autant d’occasions de tenter de porter un regard prudent, bienveillant, neutre – autant que possible – sur les personnes, ce qu’elles traversent et ce dans quoi elles s’engagent bien difficilement. C’est pourquoi les auteurs, de par leur expérience et leur contribution soulignent entre autres, l’importance d’un accompagnement de qualité avec un suivi psychologique, une assistance médicale étayante et un cadre légal ajusté.
Sylvie Laurent-Nandkissori
Psychologue et coordinatrice du dossier PMA
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