Romain GADY : Du langage des actes aux actes de langage

Selon les statisticiennes Marianne Juillard et Odile Timbart, en 2018, 45 % des condamnés pour viol sur mineur de moins de 15 ans ont moins de 16 ans au moment des faits et 28 % ont 13 ans ou moins
[4]. Les mineurs constituent également 25 % des condamnés pour agressions sur mineurs et les violences sexuelles au sein de la famille représentent près de la moitié de ces condamnations. Au regard des statistiques judiciaires françaises, une part importante des violences sexuelles se réalise donc à ce moment si particulier de la vie qu’est l’adolescence. Cette période de la vie tumultueuse est marquée par de nombreux changements corporels – puberté -, cognitifs, psychiques,sociaux, scolaires, etc. Face à ces bouleversements, les agirs – transgressifs ou non – des adolescents peuvent s’entendre comme des stratégies d’expérimentation des potentialités offertes par la puberté à un moment où ils n’ont pas encore les mots pour en parler. Il s’agit d’un langage de l’acte que l’adulte sera chargé de contenir et de décrypter. Ces actes,par leur aspect parfois violent et destructeur – scarifications, anorexies, violences sur autrui, etc. – peuvent revêtir une allure perverse transitoire sans pour autant être le signe d’une structuration perverse de la personnalité [1]. Il paraît indispensable de penser ces agirs transgressifs dans une perspective développementale et processuelle afin de ne pas entraver les possibilités d’évolutions et de réaménagements propres au travail d’adolescence.