Alors que la nomination d’un Premier ministre met fin à la vacance politique issue des élections législatives, le sujet de la santé mentale fait son retour sur la scène publique et politique. Sa mise en avant, dès les premiers pas du nouveau Premier ministre, laisse à penser que le pire est à venir pour les psychologues.
Le cœur de la stratégie actuelle du gouvernement implique de faire peau neuve. De manière systématique et à grands renforts de communication, il s’agit de donner le sentiment que tout a changé dans la forme tout en conservant un contenu identique. Forme raffinée de soft power, cette stratégie a pour avantage de ne pas coûter bien cher et de donner l’image d’un mouvement et d’une dynamique difficile à contester.
Prenons pour exemple le dispositif de remboursement libéral, Mon soutien psy. Gabriel ATTAL, alors premier ministre, avait évoqué lors de son discours de politique générale en janvier à l’Assemblée Nationale un échec du dispositif et des modifications sur certains critères fortement décriés par l’ensemble de la profession. C’est effectivement ce qui s’est passé en juin avec l’augmentation du tarif de consultation ainsi que la fin de l’adressage obligatoire en début de parcours. Le dispositif a fait peau neuve sur quelques aspects mais le fond du problème reste le même. Le financement de Mon soutien psy pourrait bénéficier aux services publics pourtant exsangues et permettrait que l’idée même de la sectorisation en psychiatrie (1960) continue d’assurer un accès inconditionnel pour toutes celles et tous ceux qui en ont besoin.
Mais ce n’est pas le cas et ce dispositif continue de représenter le soin low cost pour un public qui pourtant a des besoins massifs.
Un autre exemple récent est tout à fait illustratif. Il s’agit d’ériger la santé mentale en grande cause nationale. Si l’idée en tant que tel n’est pas inintéressante, elle relève ici d’une véritable imposture. Le Premier ministre a annoncé, dans le cadre du programme France 30, la mise en place d’un appel à projet de près de 10 millions d’euros « pour faire émerger des technologies de santé numérique innovantes ». En lieu et place de mettre les moyens nécessaires pour faire mieux fonctionner l’existant, il s’agit ici de réinventer la roue en investissant dans des recherches qui ne changeront rien à ce qui se passe pour la psychiatrie et pour les services publics de manière générale. L’effet est ici principalement une action de communication mais aussi la consécration des starts-up dans le champ du soin psychique. Ce sont donc à nouveau des entreprises privées, dont le modèle lucratif est clair, qui vont rafler la mise pour faire moins bien que les services publics.
En somme, les deniers publics n’auront jamais aussi bien alimenté le privé et dépouillé ceux pour lesquels ils existent initialement. L’entrée de plus en plus massive des opérateurs privés a pour fonction de dépecer les services publics jusqu’à l’os. Et c’est ici un des objectifs du gouvernement : la privatisation du soin. Au SNP, nous refusons cette fatalité et continuons à lutter, becs et ongles et avec de nombreux partenaires, pour éviter le pire.
Et surtout, nous n’oublions pas que faire peau neuve ne permet de changer que l’apparence et aucunement le fond. Le serpent, tout comme le gouvernement, reste le même après sa mue.