Communiqué sur le rapport IGAS
« Prise en charge coordonnée des troubles psychiques »
Le 6 février 2020, l’IGAS a publié un rapport clé sur la place croissante des psychologues dans le champ de la santé et plus particulièrement dans l’accompagnement et le traitement des troubles psychiques.
Si nous saluons l’importance donnée par ce rapport à notre profession, nous sommes vigilants quant aux objectifs et conditions du recours massif aux psychologues libéraux. Ce rapport contient des inexactitudes qui devront être corrigées
En préalable, nous tenons à réaffirmer que si nous ne promouvons aucune théorie ou école de pratique, nous sommes attachés à défendre tous les psychologues quels que soient leurs référentiels d’exercice. L’autonomie technique des psychologues est un principe fondateur auquel le SNP est attaché car il permet un exercice déontologique ajusté au cas par cas. Aucune approche ne peut répondre seule à l’ensemble des situations humaines. En conséquence nous ne pouvons valider aucun dispositif ou organisation qui porterait atteinte, voire décrédibiliserait un champ au profit d’un autre.
De plus, nous rappelons que la prise en charge des troubles psychiques est déjà assurée dans les institutions hospitalières, médicosociales, sociales, scolaires… et ce depuis plus de cinquante ans.
Quels que soient les cadres d’exercice, libéral, fonctionnaire ou salarié, les réflexions ci-après concernent l’ensemble de la profession même si la question du financement des interventions ne se pose qu’aux seuls libéraux.
L’examen du rapport, que nous allons réaliser de manière approfondie*, nous amène, d’ores et déjà, à énoncer un certain nombre de réflexions, propositions, positions.
La valorisation de la place des psychologues dans le champ de la santé
Assurer le remboursement des prestations psychologiques (de plus à un tarif ridiculement bas) ne constitue pas une réponse suffisante, ce que d’ailleurs les auteurs du rapport laissent entendre. Au-delà d’une revalorisation financière minimale, que nous estimons à 63 € la consultation, c’est l’abord même de cette conception de l’intervention psychologique que nous questionnons. La prise en charge psychologique ne peut se faire au coup par coup. Nous demandons une approche globale et harmonisée devant intégrer les positions suivantes :
Nous sommes contre une para médicalisation de la profession et donc contre la prescription médicale comme voie d’entrée dans le soin psychique. Nous réaffirmons la pertinence d’un accès direct des personnes en souffrance psychique au psychologue. Nous estimons que les médecins, comme certains le reconnaissent eux-mêmes, ne disposent pas des éléments de formation suffisants à l’évaluation de la souffrance psychique contrairement aux psychologues et de facto qu’ils ne sont pas en position de piloter l’intervention des psychologues. Par contre, la position d’intervention en première ligne des médecins généralistes justifie de développer des liens de collaboration en termes d’orientation des patients par les médecins vers les psychologues. Par ailleurs le psychologue peut rendre compte de son activité au travers de bilans quantitatifs et qualitatifs à destination des financeurs sur des critères pertinents et négociés.
Les garanties de qualité de l’intervention des psychologues dans les parcours de soins psychiques
Le rapport IGAS fait état de la non-pertinence de la réponse médicamenteuse aux troubles psychiques et de la nécessité de recourir à l’intervention des psychologues. Il dénonce par ailleurs l’insuffisance des garanties de qualification et de compétence des psychologues. Nous prenons acte de ce constat et nous y répondons par deux niveaux de garantie :
En premier lieu, si nous réfutons l’affirmation d’une formation actuelle non qualifiante, nous jugeons que, transitoirement jusqu’à la création du doctorat professionnalisant, elle doit être complétée pour augmenter son niveau de garantie. Nous estimons que la seule réforme valable est la mise en place d’un doctorat professionnalisant avec une spécialisation axée sur le diagnostic et le traitement de la souffrance psychique, qu’il s’agisse de troubles légers ou graves, auquel s’adjoindraient :
- La reconnaissance de la supervision comme une régulation permanente de l’activité des psychologues
- La formation continue qui pourrait devenir obligatoire sous réserve d’en assurer le financement.
Ce projet d’allongement de la formation est actuellement discuté au sein d’un groupe de travail réuni au ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, qui représente une action concertée et coordonnée de l’ensemble des acteurs professionnels, y compris les représentants universitaires. Le SNP souhaite la poursuite de ces travaux.
En second lieu, nous constatons avec satisfaction que ce rapport ouvre à la nécessité d’une réglementation du code de déontologie des psychologues. Le SNP rappelle son attachement à la création d’une instance de régulation dédiée. Actuellement, il travaille au sein du Cérédépsy à concrétiser cette orientation. La réglementation du code permettrait de le rendre opposable et garantirait ainsi à l’usager la qualité des conduites professionnelles.
Mais ces deux mesures seules ne sont pas suffisantes si elles ne s’inscrivent pas dans un plan plus global :
– La conception du périmètre de la santé a évolué en France. La santé ne relève pas seulement du domaine sanitaire mais intègre aussi celui du médico-social. Dans ce contexte, le soin dans sa version médicale n’est pas la seule réponse à apporter.
– L’accompagnement, intégrant la dimension relationnelle des usagers, est aussi une nécessité.
Ce rapport soulève de nombreuses questions, nous sommes ouverts à la discussion et travaillons de notre côté à y répondre.
Le 9 mars 2020
Annie Combet,
Secrétaire générale du SNP
snp_sg@psychologues.org
*un dossier spécial sur le rapport IGAS est en cours de préparation pour notre prochain numéro de la revue Psychologues et Psychologies (2020-266).